Il est illusoire de considérer comme définitivement acquise une connaissance qui ne serait pas explicitement réinterrogée par la suite. Quel enseignant ne s’est pas un jour désolé de constater que les étudiants restaient bloqués sur des exercices, non pas à cause des notions en cours d’apprentissage, mais du fait de lacunes portant sur des prérequis, pourtant validés précédemment dans leur cursus ?
Les neuroscientifiques et les cogniticiens s’entendent pour dire que l’interrogation répétée joue un rôle primordial dans la mémorisation et la persistance des apprentissages (voir le cours de Stanislas Dehaene sur le sujet).
L’activité de réactivation est organisée en deux temps. Les étudiants se testent tout d’abord sur une partie du programme de L1 en utilisant les évaluations de l’année précédentes ou des supports créés pour l’occasion. Les travaux de recherche ont en effet montré qu’il est plus efficace de donner l’occasion aux apprenants de se réinterroger plutôt que de leur réexpliquer les notions oubliées (J. D. Karpicke, J. R. Blunt, Science 331, 772 (2011). Les étudiants tentent de répondre “à froid” au sujet d’évaluation, c’est à dire avec seulement ce qui leur reste en mémoire. Ils prennent alors conscience de ce qu’ils ont oublié, pour certains c’est un choc, mais aussi de ce qu’ils ont retenu, ce qui est, de leur propre aveu, assez rassurant.
Dans un deuxième temps, les étudiants se mettent en groupe pour vérifier et compléter leurs réponses. Une fois qu’ils considèrent ne plus pouvoir avancer, les réponses leur sont données pour qu’ils puissent à nouveau vérifier et compléter ce qui manque. Ils reprennent alors les concepts qui n’ont pas été bien compris ou qui ont été oubliés.

Les étudiants interrogés à la fin du module, sont unanimement enthousiastes. Ceux qui avaient bien réussi l’année précédente ont pu prendre conscience que la validation d’une année n’est pas une fin en soi et que, s’ils visent l’acquisition de connaissances et la construction de compétences, il leur faudra sans cesse réactiver les bases. Les étudiants qui avaient moins bien réussi ont eu l’occasion d’approfondir, avec du recul et parfois un peu plus de maturité, des notions qui étaient restées floues et peu solides (et également de prendre un peu plus confiance en eux).
A la question « Les notions de L1 revues vous ont-elles semblé utiles au démarrage des cours de L2 », tous les étudiants ont répondu positivement ; 67% des étudiants ont coché la case « tout à fait, j’ai pu entrer directement dans le sujet » et 33% ont répondu « un peu mais les débuts de cours ont quand même été durs ».
Témoignages d’étudiants
« C’est une façon de plus de travailler régulièrement des notions vues l’année précédente et c’est très utile pour la suite ! »

« Je pense vraiment que c’est utile. Cela nous oblige à nous demander quelles sont les raisons pour lesquelles on ne se rappelle plus de telle chose, améliorer l’apprentissage et surtout le conserver »

« Pendant les séances c’est assez déplaisant car on sait que ce sont des notions qu’on a déjà vues. Pour plus de détails, personnellement je n’aime pas faire la même chose et voir les mêmes notions avec redondance mais malgré ce sentiment, je suis obligé d’admettre que la réactivation est très utile. »

« Cela est une très bonne chose si on s’investit. »

« Cette activité de réactivation est une très bonne idée je pense. En effet si je me dis juste que je vais réviser les cours de L1, je n’aurai aucune motivation et je ne saurai pas par où commencer. Le fait d’avoir un questionnaire et de devoir répondre à des questions dont on a oublié les réponses ou dont on a oublié les concepts abordés est beaucoup plus stimulant. C’est très frustrant de ne pas savoir alors que on se souvient avoir su la réponse ou vu le concept mais on sait que on l’a oublié. Cette frustration est motivante et pousse l’étudiant à aller chercher les réponses et à revoir les concepts dans son cours de L1 ou bien à discuter avec ses camarades pour retrouver les réponses et la signification des concepts associés »

Les enseignants de 2ème année sont également gagnants, notamment ceux qui s’appuient sur des prérequis. Ils observent une plus forte réactivité et une implication importante des étudiants.

Témoignage d’enseignants

« Mon cours porte sur l’électrostatique et la magnétostatique. J’ai donc besoin que les étudiants maitrisent la notion de vecteur pour démarrer ce cours dans de bonnes conditions. Je commence mon cours par la force électrique, j’ai pu observer à cette occasion que les étudiants réussissaient mieux que l’année précédente les exercices correspondant à cette partie suite à la remobilisation sur la force en mécanique. »

« Les étudiants de L1 suivent des cours de chimie au premier et au second semestre alors qu’en L2, la chimie ne revient qu’au second semestre. Il s’écoule donc un semestre sans cette discipline. Les années précédentes, les premiers cours étaient parfois difficiles à suivre pour les étudiants qui avaient oublié une partie des notions. La réactivation des connaissances pour les étudiants de L2 a donc eu trois effets bénéfiques :
– Faciliter l’ajout de notions plus complexes et la connexion avec les notions de l’année précédente.
– Gagner du temps puisque les rappels de cours n’ont pas été nécessaires
– Combler plus facilement certaines lacunes qui ont pu être identifiées tout de suite. »

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